Kamlaurene, couple de peintres depuis 2014, mettront cette fois la dorure à l’honneur au travers d’une exposition rassemblant vingt-huit pièces uniques sélectionnées, représentatives d’une volonté des artistes à évoluer vers d’autres matières et d’autres supports aux formats toujours variés. Les oeuvres se veulent généreuses en peinture, plus « vivantes », et ce grâce aux effets que le duo obtient à partir de mélanges de dorures, d’acryliques et d’huile. L’univers du duo s’est développé depuis leur première exposition personnelle au Cabinet d’amateur, les pièces tendent à scintiller d’avantage, le trait s’affine et les paysages se multiplient au fil des tableaux.
À travers les peintures qui seront présentées, les artistes cherchent à rendre un certain nombre d’hommages : à la dorure d’abord, parce qu’elle est leur médium fétiche pour peindre la peau dorée de leurs personnages et ainsi évoquer la préciosité, l’unicité et la rareté de chaque personne, et in fine de la race humaine. Mais aussi aux canapés abandonnés dans les rues (voir « Mille et un canapés ), à Paris (voir « Sainte Lutèce »), à la vieillesse (voir « Régénération ») ou encore au romantisme (voir « Rendez-vous galant ») ou aux jardins secrets… |
Passé l'encoignure, ils sont là. En position frontale. Le regard intense et pénétrant. Ils scrutent, observent. Attentifs. Bienveillants mais pourtant troublants. Qui sont-ils ? Que nous veulent-ils ? Qu'attendent-ils de nous ?
Des pupilles surdimensionnées, semblables aux fleurons de tournesols, leur confèrent une parenté certaine avec les humanoïdes tournesols vangoghiens, étonnant mélange d'évidente simplicité et de déroutante complexité.
L'allure des personnages, leurs postures – réminiscences d'une enfance encore si proche –, leur pureté de trait diffusent une sensation de sérénité, de familiarité. Même si, comme Henri Rousseau dont on dit que ce qu’il voyait n’était qu’amour et nous ferait toujours des yeux émerveillés, naïveté et crédulité ne sont pas de mise.
À l'image du Douanier, le décor ne joue pas les seconds rôles. En arrière-plan s'élèvent fréquemment des éléments urbains contemporains. L'ébauche d'une architecture tracée au cordeau, dont les reflets colorés préfigurent la romance entre réel et imaginaire… Vivre en couleurs pour voir le monde autrement. Les couleurs, vecteurs d'idées, de langage, de concept, longuement travaillées et assemblées à la manière de l'enlumineur monacal ou du vitrailliste médiéval.
Ici ou là, invité surprise, un hibou se tient, rangé, ainsi qu'un dieu étranger, dardant son œil sombre. Il médite. Hibou qui, depuis l'antiquité, aux côtés d'Athéna suggère sagesse et clairvoyance tout autant qu'imprévisibilité, mélancolie ou noirceur…
Kam et Laurene inspirent la peinture, la palette, la toile, le collage à pleins poumons. De l'aube au crépuscule, à l'atelier comme dans la rue, ils partagent la vision d'un être éclairé, connecté, représentant d'une « cyberhumanité » où science, technologie, médecine, connaissances, transcendent l'humain, lui offrant le « repos dominical » d'un monde meilleur.
Leur credo, leur philosophie : un état pur. Sur ce chemin, il n'y a pas de lumière éblouissante, il n'y a que des flambeaux dans la nuit.
Jean-Luc Hinsinger
Avec la complicité de Paul Eluard, Charles Baudelaire, Aldous Huxley, Michel Pastoureau et Edgar Morin. |