Novembre : le moi du jeu
« Il faisait "Zip" quand il roulait
"Bap" quand il tournait
"Brrr" quand il marchait
Je ne sais pas ce que c'était
Et je crois que je ne le saurai jamais»
(Le jouet extraordinaire, Claude François)
Le jouet c'est la machine à voyager dans le temps, l'espace, les émotions, les souvenirs… C'est le moment où l'instant présent fait la nique au passé et à l'avenir.
Le jouet, ce sont les sens en éveil, on regarde, on touche, on hume…
Le jouet c'est la découverte de la matière, des formes, du partage, de la solitude, de la camaraderie, de la colère, des jeux de rôle, de l'imaginaire, du fantasme …
Le jouet c'est le rêve, les yeux emplis d'étoiles, la maîtrise de la baguette magique, la confiance dans tous les possibles… « Il m’est arrivé quelquefois de croire jusqu’à six choses impossibles avant le petit-déjeuner. » (Lewis Carroll)
« Les enfants ont des yeux pour voir ce qui échappe à ce regard nôtre de par la culture qui nous imprègne.» (Deligny) C'est en quête de ce paradis de spontanéité et de fraîcheur que se sont lancés nombre d'artistes…
La création de jouets en est un des possibles. Apparus dans leur version commercialisable au début du XXe siècle sous l'impulsion d'illustrateurs et affichistes renommés (Caran d'Ache, Benjamin Rabier, Savignac…) les jouets d'artistes font l'objet de grandes expositions rétrospectives et le Toy's art est dans l'air du temps.
“Ceci n'est pas un jouet”
(This is not a toy, curator Pharrell Williams)
Pour l'artiste, l'affaire est belle, il peut expérimenter, inventer, se tromper, effacer, recommencer, se transformer, se ré-inventer, sortir du cadre. Libéré de ses conventions, peut-être se dévoilera-il plus que jamais !
Si l'homo-artisticus s'efface devant l'œuvre devenue objet, celui-ci, par son originalité et son caractère singulier, renvoie illico son humble créateur à l'état de démiurge à la manière du dénommé Culbuto. Parfois même avec l'excès d'un Warhol ou d'un Koons qui, par manque d'humilité ou de clairvoyance, s'ébrouent au « Mois du je ».
« Le joujou est la première initiation à l’art »
Charles Baudelaire
En ce mois de novembre, le Cabinet d'amateur se transforme en palais féerique par la grâce, non pas d'un père Noël fantasmé, mais d'un Patrick Chauraladdin et sa lampe merveilleuse habitée de peintres, sculpteurs, dessineurs, collageurs et autres pochoiristes…
Tous, quelque 25 artistes, venus s'ébrouer dans une cour de re-création pourvus d'une farandole de techniques mixtes dont peu nous chaut la teneur pourvu qu'elles soient chargées de bonheur ! Car ne nous y trompons pas : « Le jeu c'est la vie. »
Jean-Luc Hinsinger |